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Channel: cinoque.blogs.liberation.fr - Actualités pour la catégorie : Billy Wilder
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Grandeur du cinéma américain classique

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Images-1J’ai lu d’un trait Fondus enchainés, le dernier livre de Marc Cerisuelo (Le Seuil, 25 euros). Autant dire que j’y ai pris du plaisir.
 Le démarrage de ce livre sur la poétique du cinéma est certes un peu formel avec tout un tas de casquettes à soulever, des saluts plus ou moins amicaux à faire à des tas de chercheurs, «penseurs», universitaires et autres gloires reconnues qui se sont épanchés sur le cinéma. C’est cependant sur Stanley Cavell que Cerisuelo est nettement le plus disert et le plus convaincant.
Sans doute aussi le philosophe américain, commentateur émérite d’Emerson et de Wittgenstein, est-il aussi l’un des rares philosophes (le seul ? ) qui colle autant au texte, au film tel qu’il existe… Cavell est sans aucun doute le philosophe qui est le plus imprégné par cet  «art» que Balàzs, comme nous le rappelle ce livre, qualifiait justement d’américain.
Mais Cerisuelo ne se contente pas de ça, il rend hommage à André Bazin, «le premier théoricien du cinéma parlant», à Albert Laffay, qui est beaucoup moins connu et a écrit des articles très éclairants dans Les temps Modernes, ou même à Merleau-Ponty que l’on devrait relire (et pas seulement parce qu’il a déclaré aux premiers élèves de l’IDHEC, l’ancêtre de la Femis, que «le cinéma n’est pas une somme d’images mais une forme temporelle.»



Images-2Surtout avec ces guides, sa science et sa propre gourmandise, il se ballade du côté de Douglas Sirk, de ses ascendants et descendants, de John Stahl (dont Sirk a refait trois films…) et de Todd Haynes (réalisateur du très «sirkien» Far from Heaven (Loin du paradis…). Il jette aussi un coup d’œil du côté de Robert Montgomery, acteur et réalisateur américain des années Trente et Quarante, et de sa tentative ratée de cinéma subjectif avec La dame du lac. Laquelle, il y a plus de soixante ans, inspira à Chris Marker, qui n’était pas encore cinéaste, un article au titre évocateur: «L’imparfait du subjectif»…

 

Cerisuelo revient surtout sur la parenté entre le cinéma qui est au moins autant une narration qu’une représentation, sur ses liens avec le roman.

 

Images-8Et aussi évidemment sur son dada, la comédie américaine des années 30, genre qui prit la place du burlesque et fut illustré par Leo McCarey, The Awfull Truth (1), Frank Capra, It Happened One Night, George Cukor, Philadelphia Story, Howard Hawks, His Girl Friday et Bringing Up Baby.

 

Cerisuelo célèbre aussi la postérité du genre, ce qu’il appelle la seconde comédie américaine, qui revint vers ses sources burlesques, le slapstick, et fit le détour par le rythme et la logique du dessin animé, en un mot vers des cartoonists du type Tex Avery. Une renaissance du genre que portèrent au plus haut des Preston Sturges, des Billy Wilder, Frank Tashlin (qui avait été lui même réalisateur de dessin animé) et autre Blake Edwards

 

 

De cet enthousiasme qui sourd sous le propos, et ceci même quand il évoque cette vieille lune de la mort du cinéma, il ressort ce qu’il fait dire à Ervin Panovsky, grand théoricien de la peinture et cinéphile impénitent:
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«Le cinéma est le seul art vivant dans la mesure où il a conservé intacte sa relation avec un large public. Il n’est pas un grand art bis issu d’un quelconque besoin artistique, mais une pratique aux racines authentiquement populaires qui est devenue lui même en transmutant ses archétypes (comique grossier, douce pornographie, goût du sang et de la cruauté, sens de la justice, sentimentalité pure et simple ) en genres créés sui generis, »non point par le biais d’une injection artificielle de valeurs littéraires mais par l’exploitation du potentiel unique et spécifique du nouveau médium.« (2)

Je passe rapidement sur d’autres chapitres ou paragraphes sur la place du Cinémascope dans la pensée des jeunes turcs des Cahiers du cinéma, sur l’histoire de la cinéphile, sur Serge Daney … C’est chaque fois une incitation à la réflexion…

 

Ou plus simplement à revoir des films ...

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Une fois Fondus enchaînés refermé, c’est d’ailleurs ce que j’ai fait : je me suis repassé en DVD avec un plaisir non mélangé, Imitation of Life dans les deux versions, celle de Stahl et celle de Sirk, Adam’s Rib de Cukor, Lady Eve de Sturges, This Awful Truth de McCarey, His Girl Friday de Howard Hawks et tout Tex Avery… Quel bonheur !!!

P.S. Le festival de Locarno (www.pardo.ch) commence le 1er août et propose une rétrospective Otto Preminger, une chance de revoir ces merveilles, d'Ambre au Cardinal, en passant évidemment par Autopsie d’un crime sur grand écran...

1) Un clin d’œil à mon copain Pierre Guinle disparu il y a quelques mois...

2) Style et matière du septième art, in Trois essais sur le style, Le promeneur 1996.


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